Que veut finalement la France ?

Publié le par Hamid Kelley

Par France SHANDA TONME / Lemessager

Depuis l’arrivée de M. Nicolas Sarkozy à la tête de la République française, il est presque devenu difficile de percevoir avec exactitude, l’orientation de la diplomatie de son pays en Afrique. Aux déclarations d’intentions les plus ambitieuses, succèdent des signes et des actes qui n’indiquent aucun changement, et encore moins une volonté effective de désengagement des méthodes et des combines sales d’un passé récent.
La situation existante au moment où Sarkozy prend les rênes du destin des relations franco-africaines, peut se résumer dans trois grands paramètres. Le premier réside dans la modification substantielle du paysage géopolitique dominée par l’arrivée en force de la Chine. Non seulement Pékin ne s’embarrasse point de la langue de bois qui dicte la bonne gouvernance et les droits de l’Homme, mais plus grave, le nouveau géant s’impose en partenaire qui force l’admiration en usant des grands moyens. Les investissements chinois dans les grands projets d’infrastructure ont en effet fait dire à Abdoulaye Wade, le président sénégalais, “ que la Chine a réalisé en moins de cinq ans, ce que les Occidentaux n’ont pas fait en quatre siècles. ”
A “ l’invasion ” chinoise qui concrétise une pénétration financière, humaine et matérielle imparable, admirable, et imbattable, vient s’ajouter un activisme américain débordant. Les Etats-Unis sont engagés depuis la fin des années 1990, dans un programme méthodique de promotion de la démocratie et des droits de l’Homme, à travers la meilleure des stratégies possibles qui s’appuie sur l’émancipation de la société civile.
Le deuxième paramètre, résulte de l’essoufflement général de la diplomatie française et d’une certaine perdition de son intelligence stratégique lorsqu’il s’agit de l’Afrique. Paris est resté bloqué dans une vieille image de l’Afrique dépourvue de toute imagination et de toute évolution. Depuis Jacques Foccart, rien n’a été pensé, envisagé, essayé, ou préparé pour prendre en charge les exigences élémentaires de mutation de la relation franco-africaine.
Le troisième paramètre enfin, est la forte imbrication de certains milieux d’affaires français pas très propres avec quelques grandes familles politiques très actifs. Les relations qui en découlent, s’incrustent au cœur des régimes régnants sur le continent, dégageant une forte odeur d’insanité, de tricherie et de corruption.
Que faire, ou comment se donner un air d’ange et de réparateur des erreurs de la diplomatie française, sans tuer ce qui est considéré par certains, comme la poule aux œufs d’or ? Comment réagir face à la pénétration chinoise qui sans qu’il soit même besoin de faire un dessin ou de demander des chiffres au président sénégalais, constitue une terrible humiliation pour la France ? Comment se départir d’une image bien embarrassante de puissance coloniale obscurantiste dépassée et cynique ?
La situation qui existe aujourd’hui, est même encore plus difficile à clarifier qu’au moment où Sarkozy arrive au pouvoir. Le nouveau et jeune président semble s’être trop excité pour peu de résultats, et surtout, pour plus d’ennuis et de confusion. En dépit des discours de Dakar et de Johannesburg, les Africains de tous les bords ne sont pas rassurés et continuent de manquer de repères pour une lisibilité transparente des intentions françaises. La promesse de fermer les bases militaires ne prouve rien, et les multiples sorties annonçant que rien ne sera plus comme avant, sont contrariées par les faits. Les pays africains au sud du Sahara demeurent certes sans grande importance économique et commerciale dans la masse globale des échanges internationaux de la France, mais le poids diplomatique et géopolitique du continent demeure un atout dans la concurrence feutrée entre les grandes puissances. En effet plus de 60 pour cent des échanges français se font avec les partenaires européens, et le premier pays d’investissement en Afrique n’est ni le Gabon, ni le Congo, ni le Cameroun, mais le Nigeria suivi de l’Afrique du Sud.
En réalité, les grands groupes à l’instar de Total, Lafarge, Scoa et Bolloré, exercent un chantage énorme sur la classe politique française et celui-ci se transforme en diktat sur les choix et les orientations de la politique en Afrique. Si le volume des échanges avec l’Afrique est minime dans la somme globale des échanges internationaux, il est néanmoins important et capital dans le financement et la survie de nombreuses familles politiques de l’Hexagone. Ceux qui viennent chercher l’argent en Afrique auprès des dictateurs, ne se gênent jamais et sont toujours sûrs d’en trouver en quantité. Gauche comme droite puisent dans les caisses des Etats africains et parfois jusque dans les comptes personnels des chefs d’Etats, lesquels sont en retour assurés de tous les soutiens.
Rendus en Afrique, le discours sur les droits de l’Homme, la bonne gouvernance et autres quolibets humanitaires n’ont plus de sens. Les Roccart, Danielle Mitterrand, Vergès, ainsi de suite, se fichent éperdument du sort des nègres et savent d’avance qu’aucun journal dans leur pays, n’osera les dénoncer. A propos de la presse française justement, elle ne se prive jamais de recevoir l’argent de Sassou Nguesso, de Biya ou de Bongo, sous le couvert de publi-reportages. L’immoralité de l’argent sale issu des détournements, ne les traumatise point.
En fait, il ne faut pas attendre de la France qu’elle fasse d’elle-même, à sa manière, et en son temps voulu, sa révolution en Afrique. Le manque d’ingéniosité et de vision dans la politique africaine de la France procède d’une véritable malédiction génétique. Sarkozy a beau discourir, ce que l’histoire retiendra, c’est le renvoi du ministre de la Coopération (ministre des colonies), monsieur Bockel, exactement comme Mitterrand renvoya Jean Pierre Cot de son premier gouvernement. Les deux ont commis le même crime, celui de déclarer avec un peu trop de conviction, que “ rien ne sera plus comme avant. ”
Des faits très simples rappellent chaque jour aux Africains des colonies françaises, que le jour de l’indépendance et de la liberté est encore loin, et de toute façon que les discours de Cancun, de La baulle, de Dakar, de Johannesburg, traduisent la même réalité d’une ruse politique pour mieux continuer sous d’autres formes, le pillage, l’asservissement, et la soumission. Les Camerounais qui manquent de ciment pour construire leurs cases, savent bien que c’est la faute de Lafarge. Les Gabonais et les Togolais qui payent trois fois le prix de sortie d’usine pour avoir une voiture japonaise, savent que c’est Scoa qui en est responsable. Il n’est pas jusqu’à la corruption, qui ne soit mis au compte de la France.
La réalité d’un immobilisme de la France et de l’absence de toute volonté honnête de changement dans sa politique en Afrique, est encore plus patente dans le comportement de ses diplomates en poste. C’est une continuité qui ne laisse la place à aucune spéculation. Bien que le pays n’ait pourtant plus les moyens d’une domination absolue, ses représentants restent enfermés dans les rêves d’un patron qui refuse d’accepter sa réalité en surfant avec de vielles chansons. Comment croire à ces gens-là, et comment les juger vraiment ?
Mais que veut donc franchement la  



Source : Lemessager.net




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