Les nouveaux chantiers de l’espérance africaine

Publié le par Waldar

Beaucoup a été dit sur l’Afrique et les africains. Tout semble être dit sur la coopération des pays du Nord le continent noir. Beaucoup d’encre a également coulé sur le destin « misérable » de ce continent en perdition. Selon les observateurs avertis, l’Afrique est un continent perdu. Un monde à part, de lente agonie, de désespérance incurable, de sauvagerie absolue et de bestialité et de haine ethniques froides et intimes! Tel est le décor qui a été souverainement planté par des « assassins techniques » des organisations de la coopération internationale. Un couperet qui tombe, sans appel, sur nos têtes de la part de nos « maîtres-médias », et souvent malheureusement avec la complicité coupable de certains fils et filles égarés ; des traîtres de l’Afrique, des races de vipères qui n’hésitent pas à jeter en pâture l’image de notre cher continent.

Les preuves? Des coups d’État, des génocides, des guerres interminables ; ignorance, famine, alcoolisme, tabagisme, malaria, sida et autres pandémies de toutes sortes qui plongent l’Afrique dans une longue et lente agonie irrévocable. C’est la faute aux seuls africains, nous dit-on et nous acquiesçons ! Les contres performances économiques,  conséquences directes des choix irrationnels de ses dirigeants, placent ce continent au dernier rang de la marche vers le modernisme.

Et comme si cela ne suffisait pas, le Sida vient jouer le trouble-eau, avec sa partition, tiré du répertoire inédit de la symphonie de Mozart dans ce concert de malheurs, frappant ainsi de plein fouet les forces vives des nations africaines. Des villes et campagnes entières agonissent, meurent et se meurent dans l’indifférence générale du reste de la communauté des humaine.        

Les médias occidentaux, encore et toujours eux, en quête du sensationnel, ressassent sans cesse, à longueur d’émissions, des images de « ces africains » qui feraient mieux de ne pas naître. Et comme pour donner raison à ces détracteurs de l’Afrique, les africaines et les africains, eux-mêmes, victimes de ce matraquage, se sont, hélas, laissés tenter par le décrochage affectif et le désespoir. 

Mais au delà de cette écume, n’y a-t-il pas des raisons d’espérer pour l’Afrique ? Quelle espérance portent ces vagues souterraines de l’Afrique, de notre Afrique en ce début du troisième millénaire? Ces malheurs qui matraquent mais ne tuent l’Afrique annoncent certes des sanglots si audibles et si touchants. Mais ces sanglots ne sont-ils pas de résistants sanglots de la résistance de tout un peuple dans sa longue, pénible et silencieuse marche vers la victoire finale de l’espérance sur la désespérance ? Et cet espoir est porté par la nouvelle génération d’hommes et de femmes, des filles et fils de l’Afrique! De nouvelles perspectives historiques et un nouvel état d’esprit sont, aujourd’hui, nés  en Afrique.        

N’est-ce pas l’espoir qui renaît quand, ici et là en Afrique, des femmes qui, hier encore porteuses dociles de tant de souffrances, s’éveillent aux délices de la liberté et de la créativité? N’est-ce pas l’espoir qui renaît quand ici et là en Afrique, des femmes organisent à l’indifférence suspect de la communauté internationale, des chaînes de survie et de solidarité; inventent de nouveaux espaces de civilisation où elles sont désormais sujets actifs de leur propre histoire?  

N’est-ce pas l’espoir qui fleurit quand les jeunes des villes et des campagnes investissent le champ politique, réclament avec  force et détermination une nouvelle éthique du pouvoir, et par la magie de leurs mains affamées, créent à longueur des journées des outils utiles et inutiles dans une perspective réinventée de la modernité?

N’est-ce pas l’espoir qui éclate quand les nouvelles générations d’entrepreneurs, d’artistes et autres travaillent sans relâche à produire des richesses et tentent vaille que vaille de les distribuer sur place?

Et que dire des nouvelles libertés politiques et syndicales acquises au prix de tant de luttes et de tant de sang?

Oui, c’est l’Afrique. L’Afrique du renouveau. C’est bien l’Afrique mystérieuse des nouveaux chantiers de l’espérance. C’est une Afrique qui marche, certes, aux pas de caméléon mais tout de même debout sur ses pieds. Cette Afrique là existe et elle marche, silencieusement, l’échine dorsale courbée, certes, sous le poids du passé ; aux pas rythmés de sanglots et de gémissements lugubres,  bercée par le cri maléfique du hibou mais inéluctablement, seule sur son chemin vers sa destination, en suivant sa destinée! C’est bien l’Afrique, notre Afrique. Une « Autre Afrique » debout, tout de même !

Et cette Afrique là est bien celle de l’espérance, de l’espoir des ses enfants en l’avenir. Les ressorts de cette nouvelle espérance sont invisibles aux cohortes des pleureuses et aux lunettes fumées des experts du FMI et de la banque Mondiale, incapables de s’affranchir de la tyrannie de l’instant médiatique. À ceux qui, nombreux comme vous, savent encore écouter les pouls intimes des peuples africains, nous disons sans haine et sans honte qu’un nouvel état d’esprit est né en Afrique d’aujourd’hui et est à la base de ce réel progrès dans cet autre Afrique qu’on ignore. Cette Afrique-là ne réclame ni la pitié, ni la commisération, ni l’indifférence, ni la compassion. Elle réclame qu’on la regarde enfin, non pas à travers des médias tendancieux, mais en face, les yeux dans les yeux. Ne serait-ce pas là la preuve de la maturation des relations par trop déséquilibrées dont l’Afrique est victime depuis des siècles?        

Aux amis de l’Afrique encore nombreux, fort heureusement, en Europe et partout ailleurs dans le monde; aux femmes et à la jeunesse occidentales : il vous appartient de commencer à comprendre cette nouvelle Afrique et d’en parler autour de vous, à vos concitoyennes et concitoyens. Car l’idée de solidarité n’est pas morte en l’être humain. Se débarrasser du vieux complexe de supériorité qui se faisait, quand il s’agit de l’Afrique, une certaine idée de charité et de solidarité, nourrie par le vivier des malheurs et de la mauvaise conscience.    

L’Afrique ne demande pas de la charité! D’autant que, à l’ère de la mondialisation avec son corollaire de chaos économiques planétaires, la misère elle aussi s’est mondialisée. Elle crie déjà plusieurs chants lugubres aux portes des paradis d’hier : chant de détresse du chômage, de la solitude, du suicide des jeunes, des ravages de la toxicomanie, de la pédophilie, du désenchantement etc., sont là ! Le désenchantement d’une jeunesse occidentale en perte de repères et frappée de plein fouet par le phénomène de « suicide des jeunes ».         

La vigueur, la créativité et la convivialité africaines pourraient apporter, modestement, un nouveau souffle de sens à vos sociétés aujourd’hui déboussolées. Cela en partant de l’idée qu’en matière de relations à « l’Autre », le geste de secours pur n’existe pas. Quelles que soient la hauteur et la noblesse du geste, il s’inscrit toujours dans l’humaine attente de l’autre. L’occident n’a jamais aidé l’Afrique pour rien.  

Cordialement vôtre

Michelot Yogogombaye

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